Les nouvelles règles encadrant les élevages intensifs en Europe

L’Union européenne s’apprête à renforcer son cadre réglementaire sur les élevages intensifs, avec des propositions visant à remplacer le règlement (CE) n°1/2005 sur la protection des animaux pendant le transport. Ces mesures, en discussion depuis 2023, répondent à des critiques récurrentes sur les conditions de transport et les pratiques agricoles intensives. Les prochaines semaines seront décisives pour leur adoption, malgré des désaccords persistants entre les États membres et les institutions européennes.

Le transport des animaux et les lacunes législatives

Les travaux de la commission d’enquête du Parlement européen, menés entre 2020 et 2023, ont révélé des dysfonctionnements systémiques dans l’application des règles existantes. Des visites sur le terrain, comme celle de l’aéroport de Schiphol ou d’un élevage porcin au Danemark, ont confirmé que les contrôles étaient insuffisants pour garantir le bien-être animal.

Les recommandations clés incluent :

  • L’interdiction du transport de jeunes animaux non sevrés et de bétail de réforme.
  • La limitation des transports de longue durée, jugés incompatibles avec les normes éthiques.
  • Un renforcement des contrôles aux frontières et des sanctions pour les infractions.

Ces propositions s’inscrivent dans un contexte où plus de 1,5 milliard d’animaux sont transportés annuellement dans l’UE, souvent dans des conditions critiques.

Les défis environnementaux et sanitaires

Les élevages intensifs font face à des exigences croissantes en matière de réduction des émissions et de gestion des effluents. Le Label Bas-Carbone, promu par la France, impose aux élevages de plus de 2000 porcs ou 750 truies de respecter des normes strictes pour limiter l’ammoniac et les nitrates.

Le Label Bas-Carbone et les obligations des élevages

Les élevages concernés doivent adopter les Meilleures Techniques Disponibles (MTD), notamment :

  • La couverture des fosses de stockage pour réduire les émissions d’ammoniac.
  • L’application des conclusions MTD de la Commission européenne, fixant des seuils d’émissions.
  • Le respect de la directive nitrates 91/676/CEE, visant à limiter l’eutrophisation des sols et des eaux.

Ces mesures répondent à des enjeux critiques, l’élevage industriel étant responsable de 20 % des émissions de gaz à effet de serre liées à l’agriculture.

La lutte contre les pollutions par les nitrates

La directive nitrates, renforcée par les nouvelles règles, cible spécifiquement les effluents d’élevage, principaux responsables de la pollution azotée. Les éleveurs doivent désormais :

  • Épandre les effluents de manière contrôlée, en évitant les périodes de lessivage.
  • Stocker les déjections dans des installations étanches, conformément aux normes MTD.

Ces obligations s’accompagnent d’un contrôle accru par les autorités nationales, avec des sanctions en cas de non-respect.

Les enjeux socio-économiques

Les nouvelles règles suscitent des réactions contrastées, entre défenseurs de l’environnement et opposants craignant des pertes économiques.

La proposition française d’interdiction de l’élevage de poulpes

En France, une proposition de loi visant à interdire l’élevage de poulpes a été déposée en avril 2025, arguant des risques éthiques et écologiques liés à cette pratique. Bien que ciblant un secteur marginal, cette initiative reflète une tendance européenne à restreindre les élevages controversés, notamment ceux impliquant des espèces sensibles.

L’impact du traité UE-Mercosur sur l’agriculture

Le traité commercial UE-Mercosur, critiqué par les ONG, est perçu comme un frein à la transition écologique. En encourageant les monocultures et l’élevage intensif en Amérique du Sud, il risque de déstabiliser les marchés européens et de saborder les efforts de réduction des émissions.

Les craintes principales incluent :

  • Une augmentation des importations de viande produite dans des conditions moins strictes.
  • Un déséquilibre entre petits éleveurs et multinationales, favorisant les modèles industriels.

L’avenir de l’élevage européen

Les négociations sur les nouvelles règles restent bloquées, notamment en raison de l’opposition de certains États membres. Le rapporteur roumain Daniel Buda, hostile à la plupart des propositions, complique l’adoption d’un compromis.

Les obstacles politiques à l’adoption des règles

Les divisions persistent sur :

  • La durée maximale des transports : certains États défendent des seuils plus larges.
  • L’interdiction des animaux de réforme : un sujet sensible pour les filières de viande.
  • Le financement des transitions : les éleveurs réclament des aides pour adapter leurs infrastructures.

Vers un modèle agricole plus durable ?

Face à ces défis, des alternatives émergent :

  • L’agroécologie : promotion de systèmes moins dépendants des intrants chimiques.
  • La réduction de la consommation de viande : soutenue par des initiatives citoyennes et politiques.
  • L’innovation technologique : développement de systèmes de suivi en temps réel pour les transports d’animaux.

Ces évolutions pourraient redéfinir le rôle de l’UE comme leader mondial de l’agriculture durable, à condition que les règles proposées soient appliquées de manière cohérente. La prochaine étape cruciale sera l’adoption définitive des textes, attendue dans les prochains mois.

Crel

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